De l’ombre à la lumière

Parmi les thématiques actuelles en vogue, la qualité de vie au travail (QVT) fait partie des axes d’amélioration que bon nombres d’entreprises mettent en œuvre pour les employés.
C’est dans cette optique de bienêtre professionnel, que les personnes en situation de handicap peuvent voir une adaptation de leur poste et de leur temps de travail.

Si certaines entreprises s’investissent pleinement dans ce sens, d’autres ont été des précurseurs en la matière, et ce, bien avant l’heure.

 

Once upon a time

Pour vous en parler, je n’ai pas eu à chercher bien loin, puisque mon histoire familiale contient un de ces exemples qu’on pourrait croire tout droit sorti d’un film, et pourtant…

Je vous emmène faire un voyage dans le passé Lyonnais d’une maison bourgeoise, qui aujourd’hui rayonne par sa notoriété culturelle et sa splendeur architecturale, et vous invite à pousser les portes de l’Institut Lumière.

Imaginez vous promener dans son parc par une belle journée ensoleillée, ou bien vous asseoir dans un des sièges de son cinéma.
C’est aujourd’hui chose aisée à faire, et lorsque l’on entre au sein même de cette maison, on y trouve ses archives qui font le bonheur de bien des étudiants en cinéma et de cinéphiles tant elles regorgent de documents oubliés retraçant, entre autres, l’histoire du 7ème art.
Mais il faut néanmoins se rappeler qu’il s’agissait au départ d’une maison familiale.

Et on parle bien d’une famille d’entrepreneurs, qui avaient construits leur propre usine dans leur jardin.
Ce qui est aujourd’hui le cinéma, a vu en son temps des travailleurs pas tout à fait comme les autres venir chaque jour prendre leur poste.

Leur particularité ? Certains d’entre eux étaient aveugles et avaient un rôle bien défini à jouer dans le développement des plaques photographiques, dans le noir absolu.

Ce qui pourrait nous sembler être un choix logique, n’était pas forcément aussi évident dans cette 1ère moitié du XXe siècle, affaiblie par les guerres.

Pour avoir moi-même travaillé en labo photos, je peux vous assurer qu’il n’est pas aisé de devoir remplir une caissette de papier photosensible en étant plongée dans le noir complet, et de devoir retrouver à tâtons, LA pièce qu’il manque pour pouvoir fermer la boîte, alors que l’on n’a pas « d’yeux au bout des doigts ».

Ce choix de faire appel à des personnes aveugles pour travailler dans le noir était plutôt intelligent et équitable : pour des personnes dotées de leurs 5 sens, travailler dans l’obscurité complète représente une difficulté, les yeux essayant de prendre le pas sur les autres sens pour se repérer.
Alors que les non-voyants ne ressentaient pas cette gêne et qu’ils pouvaient au contraire, faire de cette particularité un atout.

 

La solution n’est jamais loin

Bien-sûr, des témoignages comme celui-ci sont monnaie courante, mais il me semble important de savoir mettre en avant les entreprises qui ont su prendre le problème à l’envers, voire même, de faire en sorte qu’il n’y ait pas de problème.

En écrivant cet article, je me rends compte que le politiquement correct voudrait que je remplace le terme « aveugle » par « personne présentant une déficience visuelle ».
Je réalise alors à quel point le handicap n’est pas ancré dans nos habitudes.
Et encore moins dans le monde du travail dans lequel on demande à tout le monde d’être en pleine possession de tous ses moyens et sens pour pouvoir occuper un poste, même si celui-ci est très différent de celui du voisin.

Et d’ailleurs, lorsqu’on questionne des personnes en situation de handicap, elles ne se revendiquent pas comme telles, bien au contraire.
Leur but est d’être considéré comme un employé parmi tant d’autres, certains allant jusqu’à ne pas déclarer leur handicap pour ne pas être cataloguée et mis à l’écart.

Pourtant, aujourd’hui encore, des industries font le choix d’adapter leurs recrutements aux spécificités techniques de leurs contraintes de fabrication. Axant leurs recrutements sur des critères allant au-delà des simples compétences et adaptant ainsi leurs méthodes de travail aux particularités de leur personnel.

Tout l’enjeu est d’ailleurs bel et bien là : dans une époque où la machine prend le pas sur l’homme et qu’on emploie des ergonomes pour adapter les postes de travail ultra robotisés à l’être humain, pourquoi ne pas replacer l’être humain au centre de la problématique ?

Bien sûr, dans un monde idéal, chacun a sa place, tant professionnelle que personnelle.
Mais nous ne vivons pas dans un monde idéal, et beaucoup sont obligés de mener une véritable bataille pour avoir le droit de travailler.
Alors sans aller jusqu’à l’utopie, pourquoi ne pas essayer de re-créer un monde du travail ?
Un monde où la valeur ajoutée de chacun ne se mesure pas qu’à sa performance à arriver plus vite à l’épuisement et où le handicap n’est plus un mot « politiquement incorrect ».

 

Karine Cascino – Coywriter

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